mais avec quels mots seulement pourrai-je encore continuer à dire maintenant que tous me semblent tellement usés, à force de traverser cette bouche ; à la longue ils me fatigueraient, s'ils continuaient sans cesse à revenir, à me tourner la langue, que d'ailleurs je me suis asséché d'un soleil entier qui s'inclinait, mais qui penchait tant et si bien qu'il finit par ne plus rien éclairer du tout, une lumière rase et refroidie, au plus près du sol et de la terre, comme perdue dans les mains du silence, une vacance pour l'étoile presque, ou pour le moins une décision de la rendre, de la laisser au plus offrant, une manière comme une autre de lui intimer de s'en aller, voilà, qu'elle me laisse dans ma solitude dorénavant, qu'elle me préserve d'elle, qu'elle disparaisse, ou qu'elle se taise, à jamais, et que je puisse demeurer l'analphabète, le verso du poème, l'oublié, ou alors qu'elle me mange, définitivement, que nous n'en parlions plus, le temps de s'interrompre au beau milieu de l'autre, le nocturne, celui qu'on attendait plus, à portée de vue pourtant, à quelques encablures de la démence ;